La loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne a été publiée le 23 avril 2024. Cette loi vient encadrer le principe de l’acquisition des congés payés en période de maladie et fait suite au revirement de jurisprudence opéré par la Cour de cassation le 13 septembre 2023.
Afin de vous permettre de connaître les contours de votre obligation, nous vous proposons un récapitulatif des principales nouveautés en la matière.
1. L’ouverture d’un droit aux congés payés ouvert à tous
La loi du 22 avril 2024 modifie notre Code du travail afin d’intégrer le principe selon lequel toute période d’arrêt maladie, quelle qu’en soit l’origine, est considérée comme du temps de travail effectif pour la détermination du droit à congé.
Ainsi, le salarié en maladie non-professionnelle ouvre désormais droit à 2 jours ouvrables de congés payés par mois d’absence, dans la limite de 24 jours ouvrables par période de référence. Cette acquisition s’applique sans limitation de temps et donc quelque soit la durée de l’absence.
S’agissant des salariés absents dans le cadre d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, l’acquisition sera fixée à hauteur de 2,5 jours ouvrables de congés payés par mois d’absence, soit 30 jours par période de référence, sans limitation de durée dans le temps. Rappelons qu’avant cette loi, cette acquisition était limitée à une année.
2. De nouvelles dispositions concernant le calcul de l’indemnité de congés payés :
Le code du travail prévoit initialement deux méthodes afin de déterminer l’indemnité de congés payés à verser au salarié. Celle-ci se calcule selon la formule la plus avantageuse entre :
- La méthode du maintien de salaire ;
- La méthode dite du 1/10ème.
La nouvelle Loi vient aménager la méthode de calcul de l’indemnité de congés payés en cas de maladie non-professionnelle.
Ainsi, pour le calcul de l’indemnité de congés payés selon la règle du 1/10ème, les absences pour maladie non-professionnelle seront considérées comme donnant lieu à rémunération dans la limite de 80%.
Un comparatif sera donc réalisé entre la règle du maintien de salaire « classique » et la règle du 1/10ème plafonnée à 80% de la rémunération.
3. Une nouvelle obligation d’information à la charge de l’employeur :
Le code du travail tel qu’il a été modifié fait peser sur l’employeur une toute nouvelle obligation d’information de ses salariés.
Ainsi, à l’issue d’une période d’arrêt de travail du salarié pour cause de maladie ou d’accident d’origine professionnelle ou non, l’employeur doit porter à la connaissance de son salarié, dans le mois qui suit la reprise du travail, les informations suivantes :
- Le nombre de jours de congés payés dont il dispose ;
- La date jusqu’à laquelle ces jours de congés payés peuvent être pris.
Cette information doit être réalisée par tout moyen conférent date certaine à sa réception. Afin d’éviter tout contentieux, une information par LRAR ou courrier remis en main propre contre décharge semble donc ici à privilégier.
Le respect de ce formalisme sera crucial pour l’employeur puisque c’est cette information qui marquera le point de départ du délai de 15 mois pour le report des congés payés acquis.
4. Un droit au report des congés payés limité dans le temps :
4.1. Cas général : les congés payés acquis avant la période d’absence :
Le salarié dispose d’une période de report de 15 mois afin de prendre les congés payés acquis avant son absence et dont il n’a pu bénéficier du fait de la suspension de son contrat de travail.
La période de report de 15 mois débute à compter de la date à laquelle le salarié reçoit, postérieurement à sa reprise du travail, les informations de son employeur sur les congés dont il dispose. Au-delà, les congés payés seront perdus s’ils ne sont pas pris.
4.2. En cas d’arrêt de moins d’un an :
En cas d’arrêt de travail d’une durée inférieure à un an, la période de report est également fixée à 15 mois à compter de la date à laquelle le salarié reçoit, lors de sa reprise, les informations de l’employeur sur le droit à congés payés dont il dispose.
S’il ne prend pas ses congés payés dans ce délai de 15 mois, ceux-ci seront perdus.
4.3. En cas d’arrêt de plus d’un an :
Le code du travail pose une règle différente pour les congés payés acquis pendant un arrêt pour maladie ou AT/MP d’une durée d’au moins un an et couvrant toute la période de référence.
Dans ce cas, la période de report de 15 mois débute à la fin de la période de référence au titre de laquelle ces congés ont été acquis.
Si le salarié reprend le travail avant la fin de la période de report de 15 mois, celle-ci est alors suspendue jusqu’à l’information donnée par l’employeur.
Nb : Dans tous les cas ci-avant exposés, il sera possible de prévoir une période de report plus longue que celle fixée à 15 mois par aménagement conventionnel (accord d’entreprise, d’établissement, convention ou accord de branche).
Attention toutefois puisque ce délai de report restera sans effet en cas d’usage d’entreprise de reporter les congés payés d’une année sur l’autre sans limitation dans le temps. Dans cette hypothèse, et afin d’éviter des compteurs de congés payés non pris trop importants, il sera possible de procéder à une dénonciation d’usage.
5. Rétroactivité et délai d’action des salariés
5.1. Une loi rétroactive :
La Loi prévoit expressément que les nouvelles dispositions relatives à l’acquisition des congés pendant une période de maladie non-professionnelle et de report des congés non pris sont applicables rétroactivement à la date du 1er décembre 2009.
Le Gouvernement a néanmoins souhaité « atténuer » le coût de cette rétroactivité en limitant à 24 jours ouvrables les congés supplémentaires pour maladie non-professionnelle qui seront acquis rétroactivement entre le 1er décembre 2009 et le 23 avril 2024.
En revanche, ne sont pas rétroactives les dispositions relatives aux congés payés acquis en maladie ou accident d’origine professionnelle.
5.2. Le délai d’action des salariés encore en poste :
Les salariés en poste dans l’entreprise au 24 avril 2024 peuvent dès maintenant réclamer les jours de congés acquis en vertu de la nouvelle loi pour la période du 1er décembre 2009 au 23 avril 2024.
Pour cela, les salariés disposent d’un délai de forclusion de 2 ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi pour agir soit jusqu’au 23 avril 2026 minuit.
5.3. Le délai d’action des salariés sortis des effectifs :
La loi ne contient aucune disposition concernant les salariés dont le contrat de travail a été rompu avant le 24 avril 2024, date d’entrée en vigueur de la loi.
Pour eux, la prescription triennale de l’article L3245-1 du Code du travail devrait s’appliquer. Ils disposeraient donc de 3 ans pour agir à compter de la rupture de leur contrat de travail.
Nous restons à votre entière disposition pour tout renseignement complémentaire que vous souhaiteriez voir préciser.
Cet article a été rédigé en juin 2024. Nous vous rappelons que cette analyse est applicable à ce jour et ne prend pas en compte les éventuelles modifications, les données sont susceptibles de changer.
Cet article a été rédigé par RUFF & ASSOCIÉS